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mardi 7 juin 2016

Deschamps, ou l'histoire d'un nom très français

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Logo officiel de la coupe de l'UEFA 2016
 À partir du vendredi 10 juin prochain et pendant 1 mois, est organisé en France la 15ème édition du championnat masculin de l'UEFA. Pour les néophytes comme moi UEFA, signifie Union of European football association. Il s'agit du nom de l'association organisatrice de cette fameuse coupe d'Europe. L'idée de faire s'affronter des équipes de foot de nations européennes est née en 1927 dans la tête du secrétaire général de la fédération française de football Henry Delaunay, mais la première édition n'aura lieu qu'en 1960 et sera remportée par l'URSS, tandis que la version féminine a débutée en 1982 (bien que la finale n'ait eu lieu qu'en 1984), et a été remportée par la Suède.

 Dans l'histoire du championnat, la France est plutôt bien placée puisque nous sommes la troisième meilleure nation à avoir remporté le trophée Delaunay avec 2 victoires (derrière l'Allemagne et l'Espagne, tenante du titre) et le meilleur buteur lors d'une même édition est un français : Michel Platini avec 9 buts en 1984.
 Les coupes masculines et féminines de l'UEFA ont lieu tous les 4 ans, celle des femmes est organisée 1 an  après celle des hommes depuis 2001. Cette année, c'est donc la France qui a l'honneur d'organiser ce tournoi sur l'ensemble de son territoire métropolitain puisque 10 villes ont été choisies pour accueillir la compétition : Bordeaux, Lens, Lille, Lyon, Marseille, Nice, Paris, Saint-Denis (Stade de France), Saint-Etienne, Toulouse. 
 Evidemment, nous espérons tous une nouvelle victoire des français qui nous mettrait à égalité dans le tableau  avec l'Allemagne et l'Espagne. Cependant, force est de constater que les conditions de la réussite ne sont pas optimales. Entre blessures pour nombre de piliers de l'EDF (équipe de France hein, pas le fournisseur d'énergie), mauvais résultat en championnat, comportement d'ado pré-pubère pour certains et polémiques stériles qui en découlent, le sélectionneur a déjà fort à faire en dehors du terrain.
Photo officiel de l'équipe de France sélectionnée
 pour la coupe de l'UEFA 2016 par Le Parisien, Olivier Lejeune.

 Alors justement, moi qui avais déjà prévu de faire mon article de la quinzaine sur cet événement et plus particulièrement sur Didier Deschamps, je remercie Cantona de me donner du grain à moudre après ses dernières déclarations. C'est pourquoi avant de vous parler de l'histoire du nom de famille Deschamps, petit retour sur l'histoire de cette inimitié entre les deux ex-footballeurs.

  • Histoire d'une inimitié : Cantona vs Deschamps

 Lors d'une interview accordée au journal anglais The Guardian, Eric Cantona accuse Didier Deschamps de racisme en décidant de ne pas sélectionner Hatem Ben Arfa et Karim Benzema en raison de leurs origines Nord-africaines. Il justifie cette accusation en affirmant qu'il a :
"un nom réellement français. C'est peut-être le seul en France à avoir un vrai nom français. Personne ne s'est jamais mélangé avec personne dans sa famille. Comme les mormons en Amérique" 
(pour lire ses propos en version originale, cliquer ici). Mais en fondant cette accusation de racisme sur le seul nom de famille du sélectionneur, c'est finalement lui qui fait preuve d'un racisme latent. Qu'est-ce qu'un vrai nom français? Est-on plus ou moins français en fonction de notre nom de famille? Benzema est-il donc moins français que Deschamps? Martin, le nom de famille le plus porté en France est d'origine Flamande, ce n'est donc pas un nom français, encore faudrait-il définir ce qu'est un nom français. En 2000, Garcia était le 8ème nom le plus porté en France, Da Silva 19ème tandis que Deschamps était le 129ème, juste après Ménard. Les propos de Cantona me rappellent justement ces fameuses listes scolaires sur la base de quoi Robert Ménard attribuait aux élèves portant un nom à consonance étrangère une confession forcément musulmane (sauf que là, c'est la version inverse). Par ailleurs, sa remarque est également sexiste puisqu'elle tends à ignorer l’existence même des femmes dans l'arbre généalogique, les noms de famille en France étant traditionnellement transmis par les hommes. Ainsi, Didier Deschamps aurait-il été moins français en portant un nom Basque dont il aurait pu hériter de son coté maternel? Non, il n'y a pas de nom plus français qu'un autre, nous ne sommes pas plus ou moins français en fonction de notre nom de famille, on est français à partir du moment ou nous adoptons et embrassons la culture française, qui que l'on soit, d'où que l'on vienne. Jamais nous ne devrions juger une personne en fonction du nom qu'elle porte... mais j'aurais l'occasion d'y revenir plus précisément dans un prochain article, pour un autre sujet.
 Eric Cantona n'a jamais vraiment apprécié Didier Deschamps, et ne s'en est jamais caché. Cette inimitié date de 1995 où leurs destins se croisent. Cantona est à l'apogée de sa carrière : depuis 1992 il est sélectionné pour jouer en équipe de France et en devient même le capitaine dès 1993. Dans le même temps, il évolue dans le championnat anglais, tout d'abord à Leeds avec qui il devient champion d'Angleterre en 1992, puis à Manchester united, avec qui il regagne le titre l'année suivante. Il devient une star dans ce pays et se fait surnommer "The king". Mais son tempérament de feu va lui jouer un tour décisif le 25 janvier 1995. Lors d'un match opposant Manchester United aux londonien de Crystal Palace, Cantona, insulté par un fan de l'équipe adverse, va lui donner un coup de pied magistral à la poitrine, suivie de plusieurs coups de poing.  


 Cet acte lui vaudra une suspension de 9 mois, et provoquera le déclin de sa carrière, principalement en équipe de France dont le sélectionneur, Aimé Jacquet, ne souhaite plus l'intégrer (bien qu'une révélation récente évoque le refus par Cantona lui même de jouer à la place de n°9). A sa place de capitaine, il préférera nommer... Didier Deschamps. Cantona accusera donc le joueur d'être la source de son éviction. Il fera ainsi sa première remarque envers Deschamps dès septembre 1996, ou il déclare dans un journal italien :
"Deschamps? ça va, parce qu'il donne toujours 100% de lui même, mais il ne sera jamais rien d'autre qu'un porteur d'eau"
Il récidive en 2007 lors d'une interview donnée à L'Equipe, dans laquelle il dira que Deschamps (et Desailly) ne sont pas des hommes, et pose la question de savoir si "ces gens la" viendraient vous sauver si vous vous noyez.

 Finalement pour Cantona, faire le buzz en lâchant des commentaires rageurs contre les autres est peut-être la seule façon qu'il lui reste d'exister, peut être même la seule qu'il ait eu car si l'on regarde sa carrière avec recul, on constate que sur le plan technique, purement sportif, il n'a rien fait de si impressionnant que cela et ne doit son succès, sa célébrité, que par ses frasques et son tempérament. Sa haine contre Didier Deschamps n'est selon moi que le signe d'une frustration de ne pas avoir le talent qu'il pense avoir ni la consécration qu'il pense mériter et rejette cette frustration contre un homme qui représente son exact opposé dans sa personnalité, qu'il sous-estime, et qui a un palmarès plus important que lui. Sérieusement Canto, je te conseille d'aller voir un psy.

  • Histoire d'un nom : Deschamps.

  Une chose est vraie, ce n'est pas très compliqué de déterminer l’étymologie de ce nom de famille. En effet, comme on peut l'imaginer le nom Deschamps désigne celui qui habite soit à proximité de champs, soit dans un lieu-dit appelé les champs ou soit qui en possède. En fonction des régions, il existe plusieurs variantes telles que Descamps ou Dechand (etc.).
 Les Deschamps sont bien répartis un peu partout en France, mais sont principalement présents en Seine-Maritime, en Haute Vienne et dans la région Haut de France. Dans le monde, on trouve également une forte communauté de Deschamps au Canada où ils seraient presque 3 000 à porter ce nom, presque 2 000 aux Etats-Unis et sont aussi présents au Brésil, au Royaume-Uni, en Belgique et au Mexique. Selon le site Namepedia, il y aurait dans le monde 61 Didier Deschamps et ce nom de famille serait porté comme prénom par 90 personnes aux Etats-unis et 10 en France (dénoncez vous!).
 Les Deschamps sont mêmes présents dans des mondes virtuels puisqu'on trouve également toute une famille avec ses ascendants dans l'ensemble de la série des jeux de simulation Les sims.


  Ce nom de famille a fait une grande percée dans le classement puisque de la 129ème position en 2000, il est passé à la 92ème aujourd'hui.

  • Histoire d'un Deschamps : Didier, Ô capitaine mon capitaine.

 Didier Deschamps est né le 15 octobre 1968 à Bayonne. Il a grandi dans un milieu plutôt modeste, ouvrier, avec un père peintre à l'aérodrome de Biarritz et une mère vendeuse. Très secret sur sa vie privée, c'est à peu tout ce que l'on sait sur sa famille proche. Pour ce qui concerne ses ancêtres, je vous renvoie au site Racine et généalogie qui a fait un bref article sur ses ascendants.
Didier Deschamps, source : Mediazap-tv.fr
 Il commence le sport très tôt, et en bon Basque qu'il est, il commence par faire de la pelote et du rugby. Mais c'est finalement dans le foot qu'il va prendre son pied. Joueur de l'aviron Bayonnais à partir de 12 ans, il est très rapidement repéré par les recruteurs du centre de formation de Nantes. Il fait donc ses premiers pas en division 1 avec le FC Nantes en 1985. Son tempérament, et certainement sa rage de vaincre le transforment en leader naturel car quasiment partout où il va, il devient capitaine d'équipe. Après le FC Nantes, il passe par le club de Marseille de 1989 à 1994, puis le célèbre club de la Juventus de Turin de 1994 à 1999, puis Chelsea en 1999 et finira sa carrière à Valence (en Espagne) en 2001. Dans le même temps, il fait partie des joueurs indispensables de l'équipe de France depuis sa première sélection en 1988 jusqu'en 2000 après la victoire en coupe d'Europe. C'est suite à cet événement qu'il décide de raccrocher les crampons, afin de vivre pleinement sa vie de famille en compagnie de sa femme Claude, avec qui il vit depuis maintenant plus de 25 ans, et leur fil Dylan.

 Tout au long de sa carrière de joueur, il s'est constitué un palmarès impressionnant : 2 fois champion de France et 1 fois champion d'Italie, il remporte aussi 3 fois la coupe d'Italie, 1 fois celle d'Angleterre et la super-coupe de L'UEFA. Il est également 2 fois vainqueur de la ligue des champions dans 2 clubs différents. Evidemment, il compte dans son palmarès la coupe du monde de 1998 et la coupe de l'UEFA en 2000 avec l'équipe de France. Il détient par ailleurs toujours le record du nombre de sélections en tant que capitaine de l'EDF (51, comme le pastis... ça doit être son coté marseillais).

 Ses qualités de leader l'amènent à poursuivre une logique carrière d'entraîneur qu'il démarre avec l'équipe de Monaco de 2001 à 2005, puis il retrouve la Juventus de 2006 à 2007 et Marseille de 2009 à 2012. Cette même année, il est finalement choisi pour remplacer Laurent Blanc en tant que sélectionneur de l'EDF.

  • Un Deschamps dans l'histoire : Yvon, l'humoriste québécois.

 Pour terminer cet article avec légèreté, sur une note d'humour, je vous propose de faire connaissance avec un autre Deschamps contemporain qui fait l'histoire. Yvon Deschamps est un humoriste québécois, né en 1935. Il est considéré comme étant le pionnier dans son domaine, bien qu'il réfute cet honneur. C'est un peu leur Coluche (avec un coté Desproges), un humoriste "social" qui critique, qui montre les québécois dans leurs qualités et leurs défauts, mais surtout en pleine crise d'identité régionale/nationaliste, à travers des monologues ironiques.

Yvon Deschamps, source : Radio-Canada/Jean-Pierre Karsenty
 Il est né dans un quartier ouvrier du Québec. Pendant son adolescence, il prend goût au théâtre et monte pour la première fois sur une scène en 1957 pour y jouer un personnage d'une pièce de Racine : Andromaque. Après avoir tenté plusieurs expériences dans le cinéma (en 1964 dans Délivrez nous du mal de J.C Lord) et dans la musique (batteur et accordéoniste), il ouvre un restaurant mais faisant faillite, il se retrouve totalement démuni en 1968. 
 Mais "du néant, jaillit la lumière" (oh merde, voilà que je cite la bible maintenant!). Grâce à son ami Paul Buisonneau, il est embauché dans un théâtre, le Théatre du Quat'sous. Il y monte une revue composée de Louise Forestier, Robert Charlebois et lui-même intitulée l'Osstidchio. C'est dans cette troupe qu'il va dès son premier sketch, trouver son style et son public. Dans son sketch appelé les unions, qu'ossa donne?, il manie l'ironie avec élégance grâce à un personnage naïf qui vante la grande générosité et la bonté de son patron. Il composera ensuite plusieurs sketchs qui resterons des classiques de l'humour québécois comme Le monde est malade, Pépère ou Nigger Black.


On entendrait presque Coluche nous raconter "c'est l'histoire d'un mec..." dans ce sketch où il  dénonce par le biais d'un autre personnage ingénu, la discrimination et le racisme.
 En effet, Yvon Deschamps est un artiste qui évolue dans une période où le Québec se cherche encore, hésitant, issu d'un mélange entre une culture anglo-saxonne et française. Ainsi dans ses sketchs, il amène les québécois à réfléchir sur leurs identités, l'idée force étant de se définir une fierté nationale (régionale devrais-je dire?) non pas basée sur le rejet de l'autre, mais sur des valeurs communes existantes ou à définir pour l'avenir. 


 Dans une période sociale ou la France et les français se trouvent en pleine crise d'identité nationale, perdu entre les enjeux environnementaux, économiques et sociaux qui se jouent pour l'avenir, et qui se morfond dans le rejet de l'autre en projetant la faute sur autrui ("assistés", immigrés, l'Europe, etc...), la réflexion et l'expérience québécoise des années 70/80 semble être un modèle intéressant à comprendre et à utiliser pour définir un futur que nous pouvons construire ensemble sur des valeurs communes et intégratrices (zut, j'avais dit que je terminerais sur une note de légèreté...).

Et vous, quelle est votre histoire?

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